jeudi 25 juin 2009

LGF surveille un examen: Le Retour (part Two)

C'était sans compter les petits arrangements avec la Grande Machine auxquels se livrent toutes les autres Genevièves sauf la nôtre. Si on se souvient (épisode précédent) que plusieurs étudiants devaient avoir leurs résultats d'année le lendemain de l'examen de PIPOTI, on comprend aisément que l'une ou l'autre des Genevièves diligentes de l'une ou l'autre filière ait pu être tentée d'inventer une note parfaitement farfelue en lieu et place de celle que je m'apprêtais laborieusement à inscrire au fronton d'une copie somptueusement décorée de rouge, sous la lumière jaunâtre de ma lampe de bureau. Eh oui, c'est humain : plutôt que d'attendre un hypothétique mail qui lui livrerait à temps (ou pas) les notes de ce PIPOTI dont elle ignore tout, plutôt que de laisser en stand-by tous les relevés de notes incomplets alors que des hordes d'étudiants l'assaillent quotidiennement pour savoir quand aura lieu la proclamation des résultats, hop, notre Geneviève un peu excédée fignole une petite note de sa composition, mettons un 10, tiens, ça ne mange pas de pain, et elle peut ainsi éditer plus tôt le diplôme dont finalement, tout le monde a bien compris qu'il était désormais la seule et unique finalité des études supérieures.

Eh, oh, ne faites pas les étonnés : franchement, au bout de quatre trois mois de grand soir, on a bien compris que la victoire du front des feignasses était aussi complète que discrète. Dorénavant, on saura qu'une Université ne dispense pas une formation, un enseignement, des savoirs, une culture, de la réflexion, de l'esprit critique, ta ta ta, fini ces sornettes inquantifiables et flottantes, une Université, mon bon monsieur, ça produit des diplômes. Tant que le morceau de papier sort bien carré bien complet bien tamponné au bout de la machine, tout va bien, on est dans les objectifs, les petits gars. Et on a beau dire, fabriquer chaque semestre une pile de papier tamponné avec des notes inventées par Geneviève, ça nous prendra moins d'énergie, moins de temps et moins de neurones que de bâtir un cours d'agrégation, animer un séminaire de master, ou concevoir 24h de formation méthodologique pour des premières années. Vous voulez qu'on rationalise ? On en prend le chemin, voyez...

Mais revenons à nos moutons - enfin, à nos étudiants. Que s'est-il passé lorsque les vraies notes attribuées par le vrai prof de PIPOTI sont arrivées dans les secrétariats où tout plein de Genevièves fatiguées de quatre mois de bronx permanent avaient déjà inventé d'autres notes, factices, pour remplir les relevés ? Et même, plus précisément : que s'est-il passé lorsque les vraies notes étaient plus basses que les fausses ? Eh bien il se trouve que certaines Genevièves ont haussé les épaules et omis de préciser aux quelques dizaines d'étudiants en question que, euh, bon, finalement, tout compte fait, ils avaient eu une sale note, et qu'il fallait qu'ils aillent passer le fameux rattrapage. Conséquence imparable : lesdits étudiants, pas au courant, ne se sont pas déplacés, et lorsqu'avec Machin (eh oui, Machin s'y recollait encore avec moi ce jeudi) nous sommes arrivés dans la salle du rattrapage, au lieu des cent trente-sept étudiants théoriquement convoqués ce jour-là, ils étaient exactement vingt.

Vingt, et pas contents, d'ailleurs. Très mécontents que l'épreuve de rattrapage ait lieu moins de quinze jours après l'épreuve initiale ; très mécontents de n'avoir appris leur mauvaise note (ils n'ont pas tous de splendides et maternantes Genevièves…) qu'à l'usure et en faisant le siège de leur Geneviève, voire de la boîte mail du prof ; très mécontents d'avoir appris par le plus pur hasard la date, le lieu et la salle de l'examen. Certains, la veille. Certains autre, le jour-même. Bref, ils faisaient un peu la gueule, les rattrapables. Faisant fi de leur mécontentement, et forts de l'assurance que donne le sentiment de n'agir qu'entre les bornes sacrées définies par le Code des Examens, Machin et moi (et il y avait aussi un demi-prof de grec et une germaniste : pour vingt candidats, ils avaient mis le paquet…) avons procédé à la laborieuse distribution des copies, du brouillon et enfin des huit sujets différents. Puis petit coup d'œil sur la montre, "vous avez deux heures, silence désormais", air de componction, on se la jouait un peu, avec Machin.

(à suivre...)

1 commentaire:

  1. Comment ça? Entre deux ongles à vernir je lis ceci : la secrétaire attend les notes de PIPOTI par mail! Tiens, par mail? ah mais c'est qu'ailleurs on est moins feignasse qu'ici alors? Ici on laisse le coin anonymeur bien collé, comme d'ailleurs nous l'enjoignent nos autorités en triple exemplaire. On rapporte à Geneviève le paquet une fois maculé de vernis rouge, et on dé-ca-chète devant Geneviève, jamais tout seul chez soi, interdit, nan nan nan.
    Très bonne idée ça, les notes par mail : ça ira encore mieux, si je peux rester chez moi : et d'une je fais décacheter par mes enfants et le chien, et de deux je mets la note tranquillement commme d'hab, 8 si je connaîs pas, 12 sinon. A bas le stupide anonymat républicain!Vive la troisième couche de vernis!

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