mardi 24 février 2009

Cauchemar du 22 février: la suite (1)

Je me suis réveillée en nage, et j’ai précipitamment allumé mon ordinateur qui, il faut bien l’avouer, est un vrai ordi de feignasse : il met des plombes à démarrer, il lui faut plus de cinq minutes pour ouvrir un fichier Word, et un peu moins de trois heures pour l’enregistrer. Parfois, il se met à faire un tintamarre incroyable (c’est sa soufflerie : il faut bien qu’il se rafraîchisse les circuits, tellement mon intensité de travail le pousse à la surchauffe) et, le temps de souffler, il réussit l’exploit d’être encore plus ralenti que d’habitude. L’élite des grosses feignasses, à laquelle j’ai l’honneur d’appartenir, sait apprécier à leur juste valeur les longues pauses que leur principal instrument de travail leur octroie : elles leur laissent le temps nécessaire à des activités essentielles telles que s’épiler les gambettes avec de la cire enrichie en aloe vera, faire rimer manucure, pédicure et sinécure, repriser les trous des collants à coup de vernis transparent, voire, dans les jours fastes, jouer en alternance au Démineur et au Spider solitaire (mais c’est moyennement drôle, parce que cet abruti d’ordinausore met des plombes à déplacer la dame de pique que je veux mettre en-dessous du roi de cœur afin de libérer le neuf de carreau).
Mon ordinausore, comme je le surnomme affectueusement, date d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître : l’alma mater (enfin, mon alma mater, car certaines ne se fendent même pas de ce cadeau de bienvenue) me l’a offert un lointain jour de septembre, lors de ma première rentrée, sous les regards envieux des collègues jaloux de mon processeur Intel 1,66 GHz et 504 Mo de Ram, qui leur révélait cruellement combien leur propre bécane était devenue poussive. Sauf que quelques années et quarante-douze mille cours, articles, comptes-rendus, emplois du temps, relevés de notes, diaporamas plus tard, c’est mon tour de le trouver poussif (mais quoi de plus jubilatoire, pour les grosses feignasses que nous sommes, que ces instruments de travail anti-compétitifs, non performants et dépassés ?). J’ai réussi cependant à le customiser de façon notable. Je lui ai tricoté, dans une laine toute douce, une housse amovible, ornée de petits nuages et de lapins bondissants (les lapins bondissants, c’était une erreur, ça fait trop de mouvement), garnie de microbilles (avant, j’avais mis des copies d’étudiants déchirées en tout petits morceaux, mais c’était moins bien) et, comme ça, quand mes petits doigts agiles s’engourdissent à force de pianoter sur le clavier et que mon regard bleu azur se voile à force de fixer l’écran blanc, hop, je le ferme, je le glisse dans sa housse et il se métamorphose instantanément en un merveilleux coussin moelleux (bon, parfois, le sommeil me surprend tellement vite que je n’ai pas le temps de mettre la housse, et que je me réveille une demi-heure plus tard, le front barré d’un « wxcvbn, ;:! » peu discret + un horrible torticolis qui nécessite l’intervention immédiate de mon kiné).



(à suivre...)

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