Je me vois encore, en robe d’été, blanche et jaune avec des fleurs de rideaux, en train de vaporiser sur mes jambes lisses une couche légère d’auto-bronzant, corrigeant de mes orteils toujours agiles une copie de L1 2e session (légère aussi, la copie) et prêtant une oreille distraite au ruisseau jaseur de la radio. Nous sommes le lundi 2 juin 2008, et la douce voix du petit Nicolas me parle, à moi et aux cadres de l'éducation et de l'enseignement supérieur réunis à l'Elysée : « Je souhaite, dit-il, que l'enseignant de demain soit mieux formé (c’est une bonne idée), que la durée de ses études soit allongée d'un an (ah bon ? mais pourquoi ?). Je souhaite en outre que la place des universités dans cette formation soit pleinement reconnue (c’est pas déjà le cas ? jusqu’à nouvel ordre, c’est à l’université qu’on prépare les concours) ».
C’est ainsi qu’en cette radieuse journée estivale, se trouvent quelque peu troublées ma sérénité bucolique et la perspective enivrante d’acheter un nouveau maillot de bain jaune canari. Mais il en faut plus pour perturber une grosse feignasse comme moi. Je passe mes mois de juin et juillet à me prélasser, comme chaque année, dans le transat généreusement mis à ma disposition par l’Université. Je le dois à la bonté de notre président, c’est cadeau, il faut juste en échange qu’on accepte d’y voir figurer le slogan « Travailler plus pour gagner plus », en hommage à la nouvelle devise de la patrie. En échange aussi, on reste à l’Université jusqu’à sa fermeture, autour du 24 juillet (et je pense que l’arnaque, elle est là, parce qu’en fait, un transat sans bord de mer, c’est comme un baiser sans moustache). A défaut de plage, je l’installe partout où je peux : à la bibliothèque, sur l’esplanade balayée par le vent, sur l’estrade des amphis (je l’emmène pour les surveillances mais c’est pas pratique, si je m’assieds dedans, je ne vois plus personne), dans les petites salles où ont lieu les soutenances (mon collègue est obligé de se pencher pour me parler, et il me donne de discrets coups de pied si je ronfle trop fort, mais c’est confortable). Cette année-là donc, je ne me déplace jamais sans mon transat (nos maquettes de master viennent d’être validées par le Ministère, c’est toujours ça de pris), jusqu’au moment de partir pour les vraies vacances, où je n’emporte rien d’autre que mes paréos, ma crème solaire, ma trousse de toilette, mon ordinateur, mon vanity, mon lait hydratant, mes tongs, mon chapeau… (cherchez l’intrus).
A la rentrée, bronzée (merci l’auto-bronzant), souriante et détendue à l’issue de ces vraies vacances (j’ai réussi à boucler mon cours d’agreg, trois communications et deux articles pour RHLF [Revue Hilarante et Libertaire des Feignasses] ; bon, ça m’a un peu empêchée de dormir et d’aller à la plage, mais j’ai acheté trois flacons de vernis pour compenser), la phrase du petit Nicolas revient trotter dans ma tête, mais pas au point de faire frissonner mon hypertrichose aussi palmaire que chronique.
(à suivre)
au boulot feignasse
RépondreSupprimerj'adore, dans le "qui êtes vous", y'a "fonctionnaires" !!! comme quoi...
RépondreSupprimerUn mec sort de sa caisse. Il boite. Il rote, il pete, il pousse une brouette. Que dire du possesseur de subaru ? Rien, juste un gros soupir... Les belges disent : le pire n'est jamais décevant. C'est vrai ça !! (mère denis). Avoir le bout qui sent c'est tres génant. Madame le juge, je vous laisse le choix dans la date. Un whiskY?
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